Đại Nam Quấc âm tự vị/Tome I/Préface

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PRÉFACE

En quoi différe un Tự-vị d’un tự-điển ?

Pour quelles raisons avons-nous adopté le titre de Tự-vị ?

Et pourquoi, notre dictionnaire faisant une si large place aux caractères chinois, l’avons-nous intitulé Tự-vị-quấc-âm ?

Autant de questions que l’on ne manquera pas de poser.

Ce qui distingue un Tự-điển d’un Tự-vị, c’est que le premier est un dictionnaire détaillé, tandis que le second n’est qu’on vocabulaire.

Dans un Tự-điển, chaque caractère, chaque ton est suivi d’exemples tirés de textes classiques et des divers monuments littéraires ; les ouvrages et les auteurs auxquels on fait des emprunts sont cités ; les différents sens attribués aux caractère ne s’écartent pas de ceux qu’ils ont dans les livres canoniques et dans les annales qui font autorité.

Un Tự-vị, au contraire, renferme bien les caractères avec leurs tons, mais ne donne de chacun d’eux qu’une explication succincte sans exemples à l’appui.

Notre dictionnaire pourrait être considéré comme un Tự-điển, en ce sens qu’il comporte d’amples développements, qu’il donne les proverbes et cite en exemple des phrases extraites de poëmes de valeur tels que le Ca-trù, le Chinh-phụ-ngâm, le Kim-vân-kiều, etc., mais nous devons dire que ces poëmes ne sont pas des livres canoniques et no peuvent être mis qu’au rang des contes, romans et légendes.

C’est pour cette seule raison que, malgré l’abondance des détails qu’il renferme, nous n’avons pas osé mettre notre ouvrage en paralléle avec les dictionnaires chinois et l’appeler Tự-điển.

Les annales nous apprennent qu’à l’origine, le royaume d’Annam était désigné sous le nom de Giao-chỉ, que sa position au sud de la Chine lui valût le nom de Nam, et que, dans les temps antérieurs aux dix-huit rois Hùng-vương, les Giao-chỉ, habitaient encore les territoires de Phiêng-ngung, Quế-lâm et Tượng-quận situés dans les provinces de Canton et de Quang-si.

Il est probable les Giao-chỉ avaient des signes représentatifs de leur langue ; mais incorporés pendant de longs siècles á la Chine, administrés par des mandarins chinois, contraints d’adopter la morale, la philosophie, la littérature, la législation, les rites et cérémonies du Céleste-Empire, ils durent fatalement abandonner leur écriture. Leur langue elle-même subit des modifications profondes soit que, faisant usage du Chinois, ils en eussent changé l’intonation, soit que les vrais Giao-chỉ se fussent peu à peu fondus dans la masse des descendants des métis chinois au langage mixte.

Avec les Giao-chỉ avaient disparu leur langue et leur littérature, il fallùt bien alors puiser largement dans le chinois pour former la langue annamite.

D’un autre côté, les mandarins, dans leurs relations habituelles, mèlant à paris égales les mots vulagaires aux termos chinois, créèrent ce qu’onappelle le langage relevé.

Même aux époques d’indépendance, sous les Đinh, les Lê antériours, les Lý, les Trần, les Lê posté-térieurs. et les Nguyễn d’aujourd’hui qui non seulement avaient secoué le joug politique de la Chine, mais encore étendu leurs frontières par la conquête du Ciampa et du Cambodge, aucun changememt ne fut apporté aux études, de sorte que les Annamites ont fini par considérer les caractères chinois comme leurs caractères propres.

Quant aux chữ nôm, leur tracé ne repose sur aucune base: chacun les écrit à sa guise à l’aide d’un son emprunté du chinois.

On n’en fait pas grand cas, et les sents ouvrages didactiques tels que le chỉ-nam, le nhựt-dụng-thường-đàm, etc., écrits en chữ nôm, ne sont que des traductions incomplètes d’ouvrages chinois.

Dans l’écriture des caractères vulgaires, on forme un mot en accolant ordinairement l’un à l’autre un caractère radical et un caractère phonétique.

La plupart du temps, le radical est mis à gauche et donne ou indique le sens; la phonétique est placée à droite et marque le son ou l’intonation.

Les radicaux sont empruntés des clefs des dictionnaires chinois.

Si par exemple, on veut écrire le caractère nước 渃 a gauche on placera le caractère 水 氵à droite le caractère nhược 若 et ou lira d’après la prononciation du caractère nhược; pour écrire le caractère lữa 焒 d’un côté on met le caractère hỏa 火 de l’autre côté le caractère phonétique lữ 呂.

Parmi les caractères appartenant à la clef khẩu supposons qu’on veuille écrire miệng 𠰘 à gauche on écrira le caractère khẩu 口 à droite le caractère mịnh 皿 et on lira en se basant sur la prononciation du caractère mịnh.

De même, le caractère nói 吶 est formé de l’adjonction du caractère khẩu 口 au caractère nội 内 qui donne le son.

Ces caractères et les milliers d’autres formés de la même manière sont appelés giả-tá.

Quant aux nombreux caractères de son annamite, mais de signification différente, comme par exemple le caractère ai 埃 dont la vraie signification est bụi bụi, mais qui considérée comme chữ nôm signifie người nào, on les écrit tels quels sans avoir recours à un caractère quelconque qui témoigne de leur emploi comme caractères vulgaires.

Quelquefois on leur adjoint le caractère Khẩu ou le signe appelé nháy nháy (‹) afin d’indiquer d’une manière abrégée qu’il faut les entendre dans leur acception vulgaire.

Si aucune règle certaine ne préside à la formation des caractères vulgaires, il en est cependant qui sont traces avec méthode et habileté. Ce sont ceux que nous devons imiter.

En entreprenant ce travail, notre intention était de donner la traduction française et, au début, plusieurs fonctionnaires français nous prêtaient gracieusement leur concours, mais, dans la suite, leur service les appela au Tonkin et nous fùmes abandonné à nous-même. Ne sachant à qui nous adresser, nous dûmes laisser de côté la partie française et nous consacrer uniquement à la partie annamite. Employant nos journées et nos veilles à écrire, à transcrire, ce ne fut qu’aprés quatre années de difficultés et d’efforis que nous vimes l’achèvement de notre œuvre.

Cependant le fait d’avoir omis la traduction française ne laissait pas de nous causer de graves soucis.

Or, M. Landes, chef de cabinet du Gouverneur général, était revenu, celle année, en Cochinchine.

C’était lui qui, les années précédentes, nous avait aidé et nous avait donné le plan de notre dictionnaire.

Après avoir examiné notre travail et reconnu qu’il était trés important, il estima qu’une traduction française lui donnerait un volume trop considérable. — D’ailleurs, il faudrait, pour cette traduction, trouver quelqu’un qui devrait travailler plusieurs années encore. Il nous dit alors : « Le dictionnaire d’une langue doit être fait exclusivement en cette langue à quoi bon traduire en français ? Comme il n’y a pas eu jusqu’ici de dictionnaire purement annamite, ne faites donc votre publication que dans votre langue et vos caractères, ce sera encore une œuvre éminemment utile. »

Songeant de notre côté qu’une langue doit nécessairement avoir un dictionnaire pour en fixer les règles, nous nous rendimes à l’avis de M. Landes, et, d’après ses conseils, nous adressâmes au Gouverneur de la Cochinchine une demande à l’effet de nommer une commission pour examiner notre travail.

Nous proposions à l’Administration de lui abandonner la propriété de notre dictionnaire, lui demandant en retour de se charger des frais d’impression, notre rôle se bornant à la correction des épreuves.

La commission nommée par M. Fourès Lieutenant-Gouverneur, présidée par M. Navelle Administateur-Conseil, voulut bien conclure à l’impression de notre travail, et le Conseil colonial nous fit la faveur de voter les crédits nécessaires.

Quant aux caractères que nous avons adoptés, ils ont été puisés aux meilleures sources : les caractères chinois sont tirés du dictionnaire de Khương-hi et les chữ nôm des poëmes que nous avons cités plus haut.

Afin de faciliter a recherche, nous avons groupé les mots sous les vingt-quatre lettres européennes et dans l’ordre du quốc-ngữ latin.

Nous nous sommes attaché à mettre l’orthographe la plus correcte.

On trouvera des signes particuliers comme c, n, c et n; ils signifient respectivement : caractère chinois, caractère vulgaire, caractère chinois employé également comme caractère vulgaire.

Grâce à la bienveillance de l’Administration, à la libéralité du Conseil colonial, nous avons la vive satisfaction d’offrir à tous le fruit de notre travail et de voir exaucé notre vœu le plus cher.

Que M. le Gouverneur, les Membres de la Commission et les Membres du Conseil colonial qui ont pris en considération nos peines et nó efforts, veuiillent bien agréer ici toute notre gratitude.

Un jour faste du mois des chrysanthèmes de l'année 1893.

(Traduit par C. Cotel)